Charles Dumercy
(1848-1934)

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Blasphèmes judiciaires
(1908)

A Jules Le Jeune 

I.
Un tribunal est un brelan élevé a la hauteur d'une trinité.

II.
Il est aussi impossible à l'avocat d'être sincère qu'à la courtisane d'être chaste.

III.
Les coquins ne sont bien jugés que par leurs pairs.

IV.
Le plus bel éloge que l'on puisse faire d'un avocat, c'est de dire qu'il est un adversaire dangereux.

V.
Le bon juge est pitoyable et impayable.

VI.
L'avocat crée le procès à son image.

VII.
L'indulgence est l'anémie de la justice.

VIII.
Il y a exactement autant de mauvaises causes que de bonnes.

IX.
Le débiteur, quand il devient malheureux, cesse d'être de bonne foi.

X.
La clémence est une maladie de la mémoire.

XI.
Un magistrat est jeune tant qu'il succombe à la tentation de croire et qu'il résiste à la fatigue d'espérer.

XII.
La vérité est la compensation de deux mensonges.

XIII.
Pour l'avocat, l'honnêteté n'est qu'un moyen et la vérité n'est qu'une ressource.

XIV.
L'éloquence n'est qu'une manière sublime de dire des bêtises.

XV.
Le juge ne peut connaître que de ce qu'il ne connaît pas.

XVI. La confraternité est une bataille de fleurs artificielles.

XVII.
La bienveillance est une forme de la prévarication.

XVIII.
Le client est un enfant terrivle.

XIX.
Le juge consciencieux ne dort bien qu'à l'audience.

XX.
L'avocat est un maximum d'habileté tempéré par un minimum d'honnêteté.

XXI.
L'inamovibilité, c'est la stagnation ; le progrès, c'est l'avancement.

XXII.
Les honoraires sont toujours supérieurs au service rendu et inférieurs au travail accompli.

XXIII.
L'éméritat est le crépuscule des vieux.

XXIV.
Les recueils de jurisprudence sont aussi nécessaires que les journaux de modes.

XXV.
On est toujours marchand de quelque chose.

XXVI.
Le barreau est le gendre de la magistrature.

XXVII.
Entre la magistrature assise et la magistrature debout il y a la même différence qu'entre une pince et une tenaille.

XXVIII.
Un confident est un complice.

XIX.
La certitude est un rêve de l'orgueil.

XXX.
L'avocat sera dupe ou fripon, le magistrat sera naïf ou féroce.

XXI.
On ne féconde la loi qu'en la violant.

XXXII.
Les bons termes n'excluent pas les mauvais procédés.

XXXIII.
L'équité est la plus dangereuse des utopies.

XXXIV.
Sans amour, l'oeuvre judiciaire n'est qu'une débauche.

XXXV.
La justice civile est une cheminée, la justice répressive est un égout.

XXXVI.
L'avocat qui amène son client à l'audience ressemble au mari qui conduit da femme au bal.

XXXVII.
La juridicité est une forme de sadisme.

XXXVIII.
Plaider, c'est pester en justice.

XXXIX.
L'amitié entre deux magistrats n'est jamais qu'une conspiration contre un troisième.

XL.
Un avocat commercial est un avocat qui connaît le commerce.

XLI.
Je crains la conscience du juge quand elle diffère de la mienne.

XLII.
Le barreau est une maison de confiance qui vit de sa réputation.

XLIII.
La vérité est au fond, non pas d'un puits, mais d'un gouffre.

XLIV.
Il y a opposition d'intérêts entre la veuve et l'orphelin.

XLV.
Je ne comprendrais jamais qu'une formule puisse obtenir l'adhésion de plus d'un esprit.

XLVI.
La canaille juridique est la pire de toutes.

XLVII.
Le droit est la porte de sortie en cas de danger.

XLVIII.
Avocats, défiez-vous de la sirène financière, qui finit en queue de poisson !

XLIX.
Seigneur, protégez-moi contre mes juges ! Quant à mes adversaires, je m'en charge.

L.
Le blasphème est un actes de foi.



Table alphabétique
DES   
BLASPHÈMES    
JUDICIAIRES   

A

Acte, L.
Adhésion, XLV.
Adversaire, IV.
Adversaires, XLIX.
Amitié, XXXIX.
Amour, XXXIV.
Anémie, VII.
Audience, XIX.
Avancement, XXI.
Avocat, II, IV, VI, XIII, XX, XXX, XXXVI, XL.
Avocats, XLVIII.

B

Bal, XXXVI.
Barreau, XXVI, XLII.
Batailles, XIV.
Bêtises, XIV.
Blasphème, L.
Brelan, I.

C

Canaille, xLVI.
Causes, VII.
Certitude, XXIX.
Cheminée, XXXV.
Clémence, x.
Client, XVIII.
Commerce, XL.
Compensation, XII.
Complice, XXVIII.
Confiance, XLII.
Confident, XXVIII.
Confraternité, XVI.
Connaître, XV, XL.
Conspiration, XXXIX.
Coquins, III.
Courtisane, II.
Craindre. XLI.
Crépuscule, XXII.
Croire, XI.

D

Danger, XLVII.
Débauche, XXXIV.
Débiteur, IX.
Défier (Se), XLVIII.
Différer, XLI.
Dormir, XIX.
Droit, XLVII.
Dupe, XXX.

E

Egout, XXXV.
Eloge, IV.
Eloquence, XIV.
Eméritat, XXII.
Enfant, XVIII.
Equité, XXXIII.
Espérer, XI.
Esprit, XLV.

F

Fatigue, XI.
Féconder, XXXI.
Femme, XXXVI.
Féroce, xxx. Pleurs, XVI.
Foi, L.
Foi (Bonne), IX.
Fond, XLIII.
Forme, XVII, XXXVII
Formule, XLV.
Fripon, XXX.

G

Gendre, XXVI.
Gouffre, XLIII.
  
H

Habileté, XIX.
Honnêteté, XIX.
Honoraires, XXII.

I

Image, VI.
Inamovibilité, XXI.
Indulgence, VII.
Intérêts, XLIV.

J
Jeune, XI.
Journaux, XXIV.
Juge, V, XV, XIX, XLI.
Juges, XLIX.
Juridicité XXXVII.
Jurisprudence, XXIV.
Justice, VII, XXXV, XXXVIII.

M
Magistrat, XI, XXX.
Magistrats, XXXIX.
Magistrature, XXVI, XXVII.
Maison, XLII.
Maladie, X.
Malheureux, IX.
Manière, XIV.
Marchand, XXV.
Mémoire, X.
Mensonges, XXII.
Modes, XXIV.
Moyen, XIII.

N

Naïf, xxx.

O
Oeuvre judiciaire, XXXIV.    
Opposition, XLIV.
Orgueil, XXIX.  
Orphelin, XLIV.

P

Pairs, III.
Pester, XXXVIII.
Pince, XXVII
Plaider, XXXVIII.
Poisson, XLVIII.
Porte, XLVII.
Prévarication, XVII.
Procédés, XXXII.
Procès, VI.
Progrès, XXI.
Protéger, XLIX.
Puits, XLIII.

Q

Queue, XLVIII.

R

Recueils, XXIV.
Reputation, XLII.
Ressource, XIII.
Rêve, XXIX.

S

Sadisme, XXXVII.
Seigneur, XLIX.
Service, XXII.
Sirène, XLVIII.
Sortie, XLVII.
Stagnation, XXI.

T

Tenaille, XXVII.
Tentation, XI.
Termes, XXXII.
Travail, XXVII.
Tribunal, I.
Trinité, I.

U

Utopie, XXXIII.

V

Vérité, XII, XIII, XLIII.    
Veuve, XLIV.
Vieux, XXII.
Violer, XXXI.
Vivre, XLII.


(texte non relu après saisie, 20.VII.07)

Couverture des Blasphèmes judiciaires (1908)


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